Périls en la demeure by Maurice Périsset

Périls en la demeure by Maurice Périsset

Auteur:Maurice Périsset [Périsset, Maurice]
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 2213012288
Éditeur: Fayard


9

S’il n’en avait déjà eu l’intime conviction, Mme Marthe Magnet eut apporté au commissaire Jardet la preuve que la mort de Bertrand Abadie et celle de Julien Combret étaient liées. Les deux photos d’adolescentes qu’il avait trouvées dans le recueil de Rimbaud étalées devant elle, elle n’hésita pas :

— C’est bien elle, oh oui, c’est bien elle ! Mais la photo émaillée de la tombe a sans doute été prise plus tard. Sur celle-ci, la fille était plus jeune. L’autre photo ne me dit rien.

— C’est moins important, dit Jardet. C’est celle-ci qui m’intéresse en premier chef.

Son opinion faite, il apprécia davantage l’affabilité de la vieille dame bavarde, ni méfiante ni curieuse et qui ne semblait pas s’étonner de le voir là et ne lui posait pas de question. Qui il était, elle semblait s’en soucier fort peu. Un interlocuteur et rien de plus ; dans sa solitude, c’était quelqu’un à qui parler, voilà tout. Pour la mettre tout à fait en confiance, il la laissait évoquer son adolescence, sa vie avec son mari, vigneron à la Crau, où il produisait un vin réputé et pas trafiqué, son fils qui était mort à vingt ans, dans un accident de moto.

— Et vous voyez, à soixante-douze ans, je vis seule, sans infirmité et mon intérieur est bien tenu !

De fait, rideaux à carreaux rouges et blancs aux fenêtres, nappe assortie sur la table, meubles simples et bien cirés, Mme Magnet ressemblait à son intérieur, sage, serein, accueillant. Héroïne tout droit sortie des romans bleus de la belle époque, elle lui tendait un verre de vin de noix qu’elle faisait elle-même :

— Goûtez-moi ça, vous m’en direz des nouvelles !

Il trouva le vin délicieux bien qu’un peu amer et puis, brusquement, il demanda :

— Vous qui allez chaque semaine au cimetière, n’avez-vous rien remarqué de particulier ces temps derniers ?

— À part les gamins qui jouent entre les tombes… Et puis si, tenez, maintenant que j’y réfléchis, un matin, très tôt, il y avait une automobile dans l’allée B. juste devant la tombe des Dancelle. Pas une conduite intérieure comme on disait de mon temps, mais une de ces voitures avec une coque en plastique, un peu comme les Américains en avaient quand ils ont débarqué, à la Libération.

— Une Méhari ?

— Au diable si je sais comment on les appelle !

— Et cette Méhari, qu’est-ce qu’elle faisait dans le cimetière ?

— C’est bien ce que je me suis demandé. Un homme s’est mis au volant quand il m’a vue arriver avec ma brouette et mon arrosoir. Et il a démarré si vite que si je ne m’étais pas garée sur le côté, il m’aurait renversée.

— Il était seul ?

— Oui. Du moins je le crois. La… La Méhari, comme vous dites, elle était bâchée comme pendant l’hiver, ce qui fait que je n’ai pas pu voir ce qu’il y avait dedans. Mais j’avoue que j’ai été bien surprise. À part les fourgons des Pompes Funèbres et les camionnettes des maçons, ce n’est pas ce genre de voitures qu’on voit d’habitude dans les cimetières.



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